Les groupements agricoles en commun (GAEC) et les Exploitations Agricoles à responsabilité limitée (EARL), sont deux formes de sociétés civiles d’exploitation agricole qui, entre autres particularités, impliquent de constater la rémunération du travail des associés exploitants avant tout partage du résultat.

En clair, dans ces sociétés, les associés participants à l’activité, c’est-à-dire, les associés qualifiés d’exploitants en EARL, et les associés qui ne sont pas dispensés de travail en GAEC, ont droit à une rémunération du travail, correspondant à un minimum d’un SMIC (soit 1383.08€ net par mois en 2023) qui doit être constatée avant tout partage du résultat.

En pratique et de manière très schématique, les associés vont, soit verser cette rémunération régulièrement sur leurs comptes courants au fil de l’exercice, et constater ce qui reste en résultat à partager lors de l’Assemblée Générale annuelle, soit, lors de cette même assemblée, établir le résultat avant rémunération, puis en déduire les rémunérations à verser aux associés exploitants, et enfin partager le solde en fonction de la clef de partage du bénéfice qu’ils ont établie.

 

Pas un salaire, mais une modalité de partage du résultat

Il est important de garder à l’esprit que cette rémunération du travail des associés exploitants d’EARL ou de GAEC n’est pas un salaire, mais une modalité de partage du résultat, elle est donc limitée par le résultat disponible. Ainsi, non seulement son versement n’est pas une charge fiscale de la société, elle fait partie du résultat à déclarer en bénéfices agricoles, mais elle ne peut pas non plus générer un déficit fiscal lorsqu’elle dépasse le résultat partageable avant rémunération.

Donc si le résultat généré par la société ne permet pas de verser la totalité de la rémunération, les associées devront soit constater le trop-perçu en déficit comptable (et non fiscal), et le partager entre eux pour annuler le trop-perçu, soit limiter son versement au résultat disponible, et à proportion des droits des associés concernés à être rémunérées pour leur travail.

Un jeune agriculteur qui projette de s’installer en GAEC ou en EARL doit avoir conscience de ce mécanisme afin de définir avec ses associés, ou futurs associés, le niveau de rémunération correspondant à l’activité économique. Le tout, dans les limites de minima et maxima définis par le code rural, et en contrôlant l’évolution des comptes courants des associés.

En effet, les comptes courants des associés vont être abondés par ces rémunérations, et le résultat partagé. A l’évidence, il est hors de question de verser aux comptes courants des rémunérations qui ne correspondant pas au résultat disponible, mais il est aussi important de contrôler l’évolution de ces comptes courants et d’éviter notamment qu’ils deviennent, par l’importance des sommes qui y sont inscrites, difficile voire impossibles à reprendre ou à rembourser.

Qu’est-ce qu’un compte courant d’associé ?

Pour être associé d’une société, il faut avoir fait des apports en capital, concrétisés par des parts sociales, ou avoir acquis des parts sociales. Mais la part sociale n’est pas le seul support de la relation entre un associé et sa société.

Cette dernière va aussi ouvrir dans sa comptabilité un compte courant au nom de chacun de ses associés afin d’enregistrer les mouvements financiers entre elle et eux. Y seront enregistrés d’une part les « apports » en compte courant improprement dénommés apports puisqu’ils ne génèrent pas de parts sociales mais l’inscription de leur contrepartie au crédit du compte courant de l’associé concerné, et d’autre part, les versements de la société (rémunération des mises à disposition de foncier, rémunération du travail, part de résultat) au crédit, et les prélèvements des associés, ainsi que leur participation au déficit et au débit.

Dans un contexte d’installation, le nouvel associé doit impérativement connaitre l’Etat des comptes courants des autres, et les circonstances qui ont conduit à leur montant. En cas de remplacement, il conviendra d’avoir aussi une idée très exacte du devenir du compte courant de l’associé sortant. En effet, lorsqu’il est créditeur, il devra être remboursé, à son nominal par la société ou l’associé qui le reprendrait à con compte.

 

Eric Mastorchio,

Directeur Adjoint de GAEC & Sociétés