Philippe Lacube prend la parole quant à sa convocation au tribunal le 18 octobre avec cinq autres représentants de la ruralité.

Trois question à …

Quel est votre parcours agricole ?
Philippe Lacube :
Je me suis installé hors cadre familial au milieu des années 90 sur les communes de Verdun et Les Cabannes à mon retour d’une mission humanitaire en Amérique du Sud. Dès mon installation, j’ai fait le choix d’un troupeau de vaches allaitantes en race Gasconne des Pyrénées. Un choix justifié par mon envie dès ma plus tendre enfance de valoriser le territoire et ses races. J’avais également à l’époque un atelier de canard gras que je n’ai plus aujourd’hui sur mon exploitation. Mon idée fondamentale était d’apporter de la valeur ajoutée à ces productions en maîtrisant la commercialisation, pour vivre dignement de ce métier et créer de l’emploi sur le territoire. Aujourd’hui, ce système de vente directe est entré dans les mœurs mais à l’époque c’était plutôt novateur. En fait, je souhaitais valoriser la culture agropastorale pyrénéenne faite de savoir-faire, d’identité, de chants et de bons produits. Rapidement, j’ai mis en place les balades sur le plateau de Beille puis par la suite j’ai ouvert un premier magasin puis un second et enfin le restaurant il y a dix ans. Trente ans après sa création, la Maison Lacube emploie 25 personnes à l’année. L’arrivée de mes enfants sur l’exploitation et de Fabien Lapeyre nous a permis de développer un atelier de cochons Gascons mais aussi d’entamer la transmission de cette dernière. Une transmission qui s’est hâtée par le fait que je devienne président de la chambre d’agriculture. Notre double démarche, patrimoniale et gastronomique, en résonnance avec les attentes des consommateurs d’aujourd’hui, a été une des clés de notre succès.

Et votre parcours politique ?
P.L.
: Depuis mon entrée dans le monde agricole, j’ai eu deux engagements forts. Le premier est lié au CerFrance dont j’ai été le président pendant de nombreuses années. Cette structure travaille autour de l’entreprise et de l’économie. Étant moi-même chef d’entreprise j’ai beaucoup aimé ce rôle. Le second concerne l’association pour la sauvegarde du patrimoine Ariège Pyrénées (Aspap, ndlr). J’ai fait partie des fondateurs de cette association au début des années 2000. Je me suis engagé contre le plan de réintroduction de l’ours pour deux raisons distinctes. Tout d’abord, suite à un gros dérochement, j’ai pu voir le désarroi dans le regard des éleveurs touchés par ce dernier. Comme nous n’avions jamais vécu ça avant, personne ne connaissait la situation et très vite ils ont été critiqués et qualifiés de mauvais bergers. À l’époque, j’ai trouvé la pression médiatique et sociale intolérable et injuste. Peu à peu, avec d’autres responsables pyrénéens, nous avons compris que la réintroduction de l’ours conduisait vers l’ensauvagement de notre territoire, ce qui compromet profondément notre vision du développement de notre massif, de sa dynamique et de son économie. C’est la raison pour laquelle nous avons créé l’Aspap. Enfin, en février 2019, je suis devenu président de la chambre d’agriculture de l’Ariège. J’ai souhaité me lancer dans cette aventure pour accompagner le monde agricole dans son développement et impulser aux projets de notre mandature cette culture d’entreprise que j’ai créé et qui fonctionne.

Comment appréhendez-vous l’audience à venir ?
P.L. :
Selon moi, cette convocation est une grande injustice. À aucun moment, la tenue du colloque des associations qui nous attaquent n’a été empêchée et nous allons le prouver. Au contraire, ce jour-là, si je n’avais pas été présent, ainsi que mes collègues appelés à la barre, le rassemblement aurait sûrement tourné à la catastrophe. J’ai été un modérateur de cette manifestation. Il est injuste que ceux qui ont tenu la foule soient convoqués. Pour moi, l’ambition de l’État est de faire taire les représentants de la ruralité. Mais, j’ai toujours dit que quoi qu’il arrive je ne jetterais pas l’éponge. Le harcèlement judiciaire est désormais l’arme des activistes écologistes mais ils ne nous feront pas baisser la tête. Au contraire, ils ont réussi à unir toutes les composantes de la ruralité et nous en sortirons renforcés. Le 18 octobre, nous serons des milliers à défiler pour défendre non seulement les six accusés, mais toute la ruralité.

Philippe Lacube, convoqué en son nom propre, actuel président de la chambre d’agriculture de l’Ariège